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Accompagner un bébé qui souffre de reflux (2/2)

Article 2 : Porter un bébé souffrant de reflux

Après avoir évoqué le quotidien avec un enfant souffrant de RGO dans le premier article de cette thématique, l’article qui suit va lui être consacré aux spécificités de portage que le reflux induit.

Entre théorie et pratique…

Dans les conseils fréquents concernant l’accompagnement de bébé ayant un reflux, on retrouve le fait de garder bébé vertical au maximum, et le portage. Sur le papier, le portage c’est idéal car cela apaise les bébés stressés, favorise l’endormissement, propose une posture verticale, libère les bras du parents, et j’en passe…

Ca, c’est la théorie.

En pratique c’est une autre paire de manches ! Les bébés souffrant de reflux ont un besoin VISCERAL d’être porté, mais bien souvent NE LE SUPPORTENT PAS ! Ils veulent qu’on les prenne, qu’on les cocoone et les rassure… Mais ne tolèrent pas le contact. En outre étant extrêmement raides, les installations sont plus complexes (pour ne pas dire parfois carrément acrobatiques).

Vous l’aurez compris avec ces quelques lignes, la pratique dans la vraie vie n’a rien d’évident !

Le cercle vicieux de l’hyperextension

La première difficulté en portage, c’est l’hyperextension, et les difficultés de manipulations qu’elle induit ! Attention, le RGO n’a pas le monopole de l’hyperextension, il y a plein d’autres facteurs pouvant favoriser cette dernière (comme un torticolis par exemple). On en parle ici dans le contexte de l’accompagnement d’un bébé souffrant de reflux car c’est une des difficultés majeures qu’on peut rencontrer, mais les conseils qui suivent s’appliquent quelle que soit la cause initiale.

Les bébés qui souffrent de reflux sont décrits généralement comme des bébés très toniques… C’est ce qui ressort souvent de l’hyperextension, et cela n’a rien à voir avec une éventuelle « avance » sur le plan du développement psychomoteur.

La posture normale (au sens de la norme) d’un tout petit est une posture souple et regroupée, avec le dos plutôt arrondi (cf position physiologique). Lorsque l’hyperextension s’invite, le bébé devient très raide, il adopte des postures droites (voire carrément « cambrées »), dans le jargon du portage on entend parfois parler de « bébé piquet ».

On pourrait penser que ces postures « jetées en arrière » sont antalgiques pour le tout-petit, qu’elles soulagent un peu sa douleur en libérant l’estomac et limitant l’occurrence des remontées, mais en fait non, c’est même tout le contraire ! Ce sont en réalité des positions « réflexes » face à la douleur.

Pour faire simple, on confond cause et conséquence, le bébé ne se cambre pas pour avoir moins mal, il se cambre PARCE QU’il a mal.

Comme on imagine (à tort donc) qu’en restant tout droit notre bout de chou aura moins mal, on va naturellement le laisser s’installer ainsi, voire l’y encourager. Cela induit 2 choses :

1/ une digestion plus compliquée (si vous restiez vous-même en position cambrée après un repas, vous verriez que ce n’est pas des plus aidants pour le digérer correctement), elle-même vectrice si vous avez bien suivi…. de remontées acides 

2/ une habitude posturale doublée d’une contracture trop prononcée des muscles dorsaux, qui vont empêcher votre tout-petit de revenir vers des postures plus regroupées (un peu comme s’il avait un élastique trop tendu tiré dans le dos)

Et voilà le cercle vicieux.

La posture en hyperextension est également problématique sur d’autres plans qu’on ne détaillera pas ici.

Mais me direz-vous, c’est bien gentil, mais que fait-on pour pallier cela et corriger le tir ?

Accompagner l’enroulement au quotidien

La première chose à faire, c’est de traiter la douleur (cf 1er article de la série consacré au reflux).

Ensuite au quotidien, on va veiller à « travailler » en douceur les « bonnes » postures, tout en limitant au maximum tous les gestes susceptibles de réinduire des hyperextensions (et vous allez voir qu’ils sont nombreux !).

Ainsi on évitera tout ce qui stimulera votre bout de chou « vers l’arrière », comme par exemple :

  • Un mobile au-dessus de sa tête (préférez une installation plutôt vers ses pieds)
  • Des jouets derrière sa tête

A bras on veillera aussi à éviter tout ce qui pourrait l’encourager à se cambrer, notamment en utilisant l’avant-bras plutôt que la main pour le porter. En effet, lorsqu’on utilise la main, ou si on place l’avant-bras trop derrière les fesses, cela créée une pression qui ramène son bassin vers l’avant au lieu de l’inviter à s’asseoir.

En somme c’est comme si on lui disait « jette toi en arrière », et à cet âge, eh bien ils écoutent ce qu’on dit !

C’est à voir comme une véritable rééducation, autant de la gestuelle du parent que de la posture globale de l’enfant.

NB : en position physiologique l’estomac n’est pas sensé être comprimé, si bébé n’est pas « tassé » ou « affaissé », son estomac reste libre.

Et le portage dans tout ça ?

Le portage on y vient. On a vu que ce dernier pouvait être plus délicat à mettre en place du fait des postures raides du tout-petit. L’autre aspect complexe, c’est la tolérance du bébé, surtout lorsque la douleur n’est pas encore soulagée.

Comme pour tout ce qui va toucher aux besoins un peu spécifiques, il est difficile de tirer des généralités et il va vous falloir faire plusieurs tests pour trouver l’outil qui conviendra le mieux à votre bout de chou, et vous armer d’un peu de patience !

Les conseils qui suivent sont ceux qui semblent être adéquats pour une majorité de bébés souffrant de reflux, mais ne constituent malheureusement pas une baguette magique marchant à tous les coups !

Choisir et ajuster son système

Le choix du système doit tenir compte à la fois des besoins du tout-petit, mais également de l’aisance du porteur.

Côté bébé on va généralement préférer des systèmes très stables et pas trop contenants.

Côté porteur on préfèrera des systèmes qui peuvent s’installer « facilement » même avec un bébé qui hurle et se raidit (on se comprend…)

Vous l’aurez compris, l’écharpe de portage (a fortiori extensible) n’est clairement pas le choix numéro 1 ! Elle peut être mal supportée par votre bout de chou (trop serrée, enveloppante), et nécessite une excellente maîtrise pour être installée lorsqu’il est en crise.

Les systèmes type mei-tai ou préformés sont souvent mieux tolérés car moins contenants, et ils présentent l’immense avantage d’avoir de la matière entre les jambes. Comprendre : lorsque choupinou est raide comme un piquet, hurle et gesticule, il reste possible de l’installer dans le porte-bébé même pour un néophyte… L’installation sera complètement ratée selon les critères usuels de la physiologie, mais il sera en sécurité !!!! Et cela vous permettra de rapidement marcher et le bercer pour l’apaiser, sans trop solliciter votre corps. Une fois plus serein, il sera toujours temps de reprendre les réglages…    

Le sling est également un système qui dans certains cas fonctionne bien, notamment car il permet une installation très progressive mieux supportée par les enfants.

Si vous utilisez un sling ou une écharpe, une bonne astuce consiste à démarrer les ajustements par la lisière du bas, et non celle du haut comme on le fait usuellement. Vous l’aurez sans doute remarqué mais souvent ce sont les réglages et passages de matière vers la nuque et les épaules qui déclenchent les pleurs : en commençant à serrer vers le bassin, cela permettra à votre petit bout de s’habituer en douceur. N’hésitez pas à faire des pauses après chaque réglage, et à marcher et bercer votre bébé pour bien qu’il se détende avant de procéder au réglage suivant.

Accepter l’imperfection

Dernier point mais pas le moindre : malgré tout ce qui a été vu au travers de ces 2 articles, il est plus que probable que votre tout petit n’adopte pas des positions très « conventionnelles » dans son système de portage.

Oubliez la boule de bébé, avec les genoux bien remonté et le dos bien arrondi… Parfois quand on arrive à obtenir un angle de 90° (ou quasi) entre le fémur et le dos, on est hyper contents et on sait qu’on arrivera difficilement à mieux !

Et à vrai dire, ce n’est pas grave ! Ce qui compte c’est avant tout que les besoins de votre bout de chou soient respectés, et que vous-même puissiez souffler un peu aussi et/ou vaquer à quelques occupations les mains libresLes voies respiratoires sont dégagées ? Il n’est pas à risque de chuter ? Alors tout est parfait.

Il ne vous reste plus qu’à mettre tout ceci en application ! N’hésitez pas également à vous faire accompagner par une monitrice de portage pour vous faire aider et ajuster les portages à votre situation spécifique. Courage et gardez le cap ! Vous êtes les meilleurs parents que possible pour votre bébé, le reflux n’est heureusement pas éternel et entre vos bons soins et sa croissance, les choses finiront par être plus faciles.